samedi 31 octobre 2020

La Toussaint à Mulhouse et ailleurs

 

En image, une des façons de se souvenir des nôtres.

Il y a à Mulhouse plusieurs cimetières et de plusieurs confessions. On peut y visiter des gens calmes et pas embêtants. Et, pour la Toussaint, on le fait comme partout ailleurs dans le monde.

Pour ne pas vous embêter avec mes chagrins, doutes, regrets ou remords, plutôt que de vous raconter ma visite, je vais vous conter une histoire.

SEQUELLES DE GUERRE

Au loin, le soleil rougeoyant tarde à disparaître derrière la petite chapelle. Le vent se lève. Des feuilles tombent à terre sans faire de bruit. Le cimetière se vide des visiteurs qui étaient venus nombreux en ce 1er novembre.

Jules ne s’en soucie guère.

Il est absorbé par ce nom : Jeanne Cosmolet.

Il se tient, devant une tombe, immobile et silencieux tel un soldat rendant les honneurs.

Étonné comme le soldat qu’il était quand, le 13 août 1914, il rencontra Jeanne. Triste comme le soldat qu’il était quand, le matin suivant, obligé de rejoindre ses troupes, il la quitta.

Cinquante ans ont passé et il la revoit telle qu’elle était : menue et frêle et jolie comme tout ce qui est délicat. Il la revoit tournoyer en riant dans sa robe jaune.

Elle riait toujours. Elle riait même quand il était dans les tranchées boueuses, quand les obus tombaient autour de lui, quand ses camarades étaient déchiquetés par les bombes ou qu’ils restaient accrochés sur les barbelés… Elle riait parce qu’il était vivant ! En tous cas, il l’imaginait comme cela et c’est cette image qui l’aidait à tenir, à survivre.

Puis, à la fin de la guerre, en 1918, quand il fut démobilisé, il s’en revint au pays.

Le hasard voulut que sa première rencontre fût celle qui allait devenir sa femme.

Elle lui présenta son fils, Jean, âgé de trois ans, lui apprit la mort de Anne, sa sœur jumelle, le 14 mai 1915 et tant d’autres nouvelles du pays, mais il ne voyait que les bonnes : il avait un fils, il avait retrouvé Jeanne et il était vivant. Il demanda à Jeanne d’être sa femme et elle dit oui en baissant les yeux.

Il trouva Jeanne un peu changée : elle ne riait que rarement et surtout, elle ne le regardait plus avec les mêmes yeux… mais la guerre change tellement les gens ! Alors qu’importe, puisqu’elle fut une femme admirable et une maman attentionnée. Il regrettait seulement qu’elle n’ait pu lui donner d’autres enfants.

Jules fait quelques pas et s’arrête devant une autre tombe. La pierre, posée récemment, est déjà couverte de souvenirs. Sur la stèle, on peut lire : Jeanne Partaud née Cosmolet. Il dépose ses fleurs et dit : « Merci Anne ! Merci pour toutes ces années de bonheur. Merci pour l’enfant. Bien sûr, il était important que Jean ait une mère, que c’était justice de le rendre à son père. Pourtant, il me semble que tu aurais pu me dire la vérité bien avant. J’aurais compris. Ce qui m’a fait le plus de peine, c’est que Jeanne soit partie en mettant au monde notre enfant. »

Le vent se lève, fait s’envoler les feuilles tombées à terre et en arrache d’autres aux branches qui se dénudent. La nature se prépare pour un long sommeil.

Devant ce spectacle automnal, Jules revoit Jeanne tournoyer sans sa robe jaune comme à chaque fois qu’il a dû affronter des difficultés. Les hivers passés étaient difficiles sans Jeanne ; celui qui vient le sera encore plus sans sa femme. Il voit virevolter les feuilles jaunies et pense qu’on oublie la feuille morte car elle est remplacée par une autre, semblable à la précédente, dès le prochain printemps.

Mais, il n’en est pas de même pour les sentiments : le rire de Jeanne n’aurait jamais pu être remplacé.

Bon, un peu de pub pour moi. Cette nouvelle est tirée de « RUMEURS » que vous pouvez vous procurer via internet. Sinon, j’ai écrit aussi :

Tableaux, le livre qui vous montrera, avec poésie, les autres faces de tout ce que vous croyez voir et

Destinations, le recueil qui vous donnera des nouvelles de ces pays lointains dont vous rêvez d’aller…

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Autre chose, j’ai rejoint une communauté d’amis dont voici les blogs : avidoxe, cap. MargenspatEcrirePastel, Elsass-by-Nath, et VittorioDenim

Merci d’aller les visiter de temps en temps comme je l’ai fait et continuerai de le faire.

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